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Hommage à Claire Wineland

Ndlr : Avant tout, je tiens à préciser que je n’ai pas eu la chance de rencontrer ou de communiquer avec l’intéressée et que tout ce qui est rapporté dans cet article est écrit/traduit à partir des vidéos en ligne provenant de la chaîne youtube officielle de Claire Wineland ou de conférences qu’elle a données.
Mon but est de perpétrer son message et de retirer la barrière de la langue en lui offrant un nouveau public.

Claire était une activiste, une artiste et sans conteste une optimiste.

Vous connaissez l’expression « Il faut tout un village pour élever un enfant » ?
On dira d’elle après sa mort que c’est l’enfant qui a élevé le village et ce village, c’était le monde.

Claire est née en 1997 avec une maladie génétique appelée la mucoviscidose, celle-ci cause une accumulation de mucus dans tous le corps (sinus, poumons, foie, pancréas, intestins, etc) poussant ces organes à dysfonctionner. C’est une maladie progressive, c’est-à-dire qu’elle s’aggrave avec le temps et c’est une maladie terminale, il n’y a pas de guérison possible. Son espérance de vie était de 10 ans à la naissance, celle-ci croît lentement jusqu’au début de la vingtaine grâce aux progrès de la médecine.

Périodes emblématiques

À 6-7 ans : prise en charge de son dossier médical

Claire était seule à l’hôpital pour une chirurgie, elle ne comprenait pas ce qu’on allait lui faire.
Elle s’est mise à poser des milliers de questions au personnel médical, elle a lu tous ce qu’elle pouvait et elle a fini par tout comprendre. Dès lors, elle pouvait parler comme un-e adulte, en jargon médical, elle était prise au sérieux et des soignants viendront même tester leurs connaissances aux siennes.

« Je veux savoir exactement ce qui rentre dans mon corps, être dans le contrôle »

C’est à la même période qu’elle s’est mise à lire les décharges que ses parents signaient quand elle partait au bloc disant que ci ou ça pouvait arriver et qu’ils ne poursuivraient pas l’hôpital. Il y avait toujours cette phrase : « Il est possible que le patient ne se réveille pas après l’intervention. ».
C’est devenu obsessionnel, elle avait besoin de lire cette ligne et d’y penser.
Pratiquement à chaque fois qu’on la mettait sous anesthésie elle faisait semblant de mourir pour plaisanter. Elle pensait être prête pour ça, elle s’imaginait partir sur la table d’opération durant une chirurgie de routine en ayant sorti une dernière blague avant de s’endormir, la main dans celle d’une infirmière qu’elle ne connaissait pas. Mais comme tout le reste, rien n’est prévisible et quand elle est partie pour la première fois, ça ne s’est pas passé comme elle l’imaginait.

À 8 ans : faire de l’hôpital sa maison

Pour passer le temps, elle aimait parcourir des magazines de déco. Elle a pris conscience du potentiel de sa chambre d’hôpital, il y avait 4 murs, une fenêtre, des meubles soit ; l’opportunité d’en faire quelque chose.
Dès lors, elle décide de décorer les lieux (et elle le fera à chaque hospitalisation), elle déplace le lit, le fauteuil, la table alors qu’elle est reliée à son oxygène et à ses antibiotiques en i.v. Elle apporte des coussins, des peluches, des plantes, des banderoles, des guirlandes lumineuses, des photos, une guitare. Elle refait ses murs en brique rouge à la peinture, elle écrit des citations et peint le système solaire (sauf Mars, omission qu’elle ne réparera jamais). Elle se fatigue tellement que toutes ses machines se mettent à sonner alertant le personnel qui vient voir ce qu’il se trame, les lieux sont méconnaissables et plein de gens veulent les visiter.
Claire pouvait rendre une chambre d’hôpital belle et rassurante.

« On est tellement coincé dans la conception que c’est un lieu blanc, froid et stérile où l’on va pour mourir qu’on ne se laisse pas la possibilité d’en faire autre chose. On dit aux enfants malades que ça ira mieux quand iels sortiront au lieu de leur apprendre à continuer à vivre à l’hôpital et à continuer à vivre avec la maladie. »

À 13 ans : coma, fondation & conférences

« Je suis techniquement morte à l’âge de 13 ans enfin, je suis revenue donc ça ne compte pas. J’avais une opération de routine à la suite de laquelle j’ai fait une septicémie (infection du sang). »

Son état s’est dégradé et elle a commencé à se sentir partir. Elle s’y était préparée toute sa vie, elle n’avait pas peur de la mort, elle découvrait cette sensation qu’elle accueillait sereinement durant quelques heures, jusqu’à ce que l’effroi la gagne, la vague de terreur qui envahissait ses proches. Elle a commencé à délirer, elle voyait les gens qui l’entouraient avec des têtes d’animaux (ce qui valu quelques coussins aux têtes des médecins). Elle avait le sentiment que son masque à oxygène était rempli d’eau, elle ne pouvait plus respirer. Elle s’est vue de l’extérieur en train de paniquer, elle s’en rendait compte, souhaitait pouvoir se calmer mais n’y parvenait pas et c’est là qu’elle a réalisé qu’elle était en train de mourir. Elle a eu cette réaction d’excitation un instant en mode « wow, cool ». Elle y avait tellement pensé durant sa vie, elle avait été fascinée par la mort et croyait naïvement être en paix à ce sujet.

Environ une heure plus tard, ce n’était plus drôle du tout : « Il arrive un moment où on se déconnecte, on perd le contrôle de nos pensées. Ce qui est bizarre car quand on est en vie on ne réalise pas à quel point on est proche de perdre le contrôle de notre cerveau, tant qu’on est à la barre, on ne se rend même pas compte qu’on tient le gouvernail. C’était comme être dans un avion qui perdrait le contrôle et devoir apprendre à piloter en chute libre. » Elle essayait de se raccrocher à quelque chose et elle n’y arrivait pas. En un claquement de doigt son état était passé de l’excitation à une perte de contrôle totale.

The all point of dying is to be scared.

« Quand vous êtes en train de mourir, chaque cellule de votre corps (votre cerveau en particulier) met toute son énergie à tenter de vous protéger et à vous faire désirer d’être en vie. Qu’importe le nombre de fois où vous avez pensé à la mort ou que vous pensiez être en paix avec elle, quand ça arrive, tout votre corps vous dit « restes en vie, reviens à la vie, bats-toi ». Qu’importe votre relation avec la mort, au moment de votre décès vous devez faire le deuil de la vie que vous auriez pu vivre. C’est une prise de conscience de tout ce que vous auriez pu faire et que vous ne feriez pas. Je devais faire le deuil de tout mon potentiel si ma vie devait s’arrêter là, maintenant, à 13 ans et je ne voulais pas lâcher ça. Les gens ne réalisent pas que vous n’êtes pas censé mourir en paix. Vous devriez avoir peur de la mort, en être terrifié, même si c’est naturel et que vous allez forcément mourir, ça veut dire que votre vie signifie quelque chose pour vous. »

Elle voulait tenir la main de quelqu’un, que quelqu’un tienne la sienne, elle voulait pleurer, crier, revenir en arrière, être quelqu’un de différent, quelqu’un de mieux, juste pouvoir vivre à nouveau l’expérience d’être en vie et elle a arrêté de prétendre que ce n’était pas le cas. « C’était tellement satisfaisant de désirer vivre à ce point. Malgré tout ce que je devais faire pour rester en vie, j’en avais envie. »

Il y a une balance entre la partie de vous qui a fait son deuil et qui veut se laisser aller et celle qui se bat. Au moment où elle s’est laissé partir, elle a été intubée et mise dans le coma. Elle se réveillera 17 jours plus tard et devra réapprendre à marcher.

Suite à cette expérience, Claire crée sa propre fondation ; The Claire’s Place Foundation. Bien que la mucoviscidose soit une maladie génétique importante, les fonds vont tous à la recherche pour trouver des traitements, elle voulait pouvoir soutenir les enfants au présent et pas juste dans le futur. Sa fondation a pour but d’aider les parents à payer leurs factures pour pouvoir passer plus de temps auprès de leurs enfants malades. Au début personne ne la prenait au sérieux mais au fur et à mesure, elle s’est faite des relations et un nom, elle fait son premier TEDx à 14 ans signant le début de sa carrière de conférencière.

Speak only positive thoughts in this room
Quand elle parle de son coma, elle rapporte des hallucinations voire des rêves. Elle se souvient que le décor changeaient en fonction de voix des gens présents, si c’était ses proches, elle était dans un lieu magnifique et paisible mais quand elle ne les connaissait pas, le décor était anxiogène.
Aussi, pour faire baisser sa température, l’équipe soignante appliquait des pack de glaces sur son corps, pendant ce temps elle rêvait qu’elle était en Alaska. Elle finira par s’y rendre avec sa famille.

La vingtaine : le déclin & la transplantation

Pendant longtemps, Claire refusait d’envisager une greffe des poumons.
En mai 2018, elle poste une vidéo où elle revient sur son état de santé, celui-ci s’est drastiquement dégradé durant les mois précédents. Ses conférences l’obligent à voyager mais elle n’a même plus le droit de prendre l’avion. Elle ne peut plus nager, randonner ou travailler. Elle doit être sous oxygène sans interruption et si elle oublie un traitement ça pourrait être la dernière fois. Même son port-à-cath (chambre implantable) ne fonctionne plus par moment, c’est problématique car ses vaisseaux sont très fins, pratiquement impossible à trouver. Sans accès, une opération n’est pas envisageable. Sa capacité pulmonaire est d’environ 25 %.
Elle est dans l’impasse, il lui reste un an à vivre, peut-être plus, peut-être moins. Pour la première fois de sa vie, elle ressent que c’est le bon moment, elle choisit la transplantation. Elle sait que ça ne la soignera pas et que ça peut mal se passer mais elle sait aussi que sans, elle ne pourra plus rien faire.

En juillet 2018 Claire ouvre un gofundme, pour la première fois elle demande qu’on l’aide financièrement. Les coûts de l’hospitalisation ne sont pas un problème, l’argent doit servir à l’année de convalescence post-greffe où elle ne pourra pas travailler. Elle récolte plus de 267k$.

Le 26 août 2018, c’est le jour de sa double transplantation des poumons. Suite à une complication chirurgicale, elle ne se réveillera jamais de son anesthésie.
Claire est décédée le 2 septembre 2018 à 21 ans.

Sujets de prédilection

Comment aborder la mort

Diagnostiquée à la naissance d’une maladie terminale, Claire a frôlé la mort à 6 reprises et a fait un arrêt cardiaque dans un ascenseur à l’hôpital (sans compter la raison de son véritable décès, un caillot sanguin). Il lui est aussi arrivé de désaturer (quand le taux de saturation en oxygène diminue dans les artères) alors qu’elle était aux toilettes, qu’elle doive se précipiter sur son inhalateur pour appeler les secours.

« La mort est inévitable. Vivre une vie dont vous êtes fier est une chose que vous pouvez contrôler »

Claire n’aimait pas les Bucket list (to do list avant de mourir), elle n’en a pas fait. Cocher des points sur une liste ne donne pas l’impression que la vie vaut la peine d’être vécue mais donner de sa personne, oui. Quand on veut simplement être heureux, ça ne nécessite que de la sérotonine, dans ce cas prenez un joint et écoutez du Bob Marley. Mais une vie qui en vaut la peine nécessite qu’on sorte de notre zone de confort pour faire des choses compliquées. Elle avait juste besoin de se sentir utile, de contribuer à la communauté, d’avoir des relations réelles avec les gens.

« La vie c’est des montagnes russes d’émotions folles, une seconde vous êtes heureux et celle d’après vous êtes désespérés et vous avez le sentiment que plus rien n’ira jamais. Ce qui importe c’est ce que vous faîtes de votre vie, la fierté de ce que vous avez accompli et ce que vous avez apporté au monde. C’est tellement plus important que votre bonheur.
Je me moque d’être malade, je ne voudrais pas être en bonne santé, je ne tente pas de me réparer, ma souffrance m’a donné tellement que je peux offrir moi-même au monde. Les gens voient la maladie comme un fléau parce qu’iels ne comprennent pas que nos difficultés peuvent aussi être un cadeau. Vos difficultés peuvent autant vous en apprendre que les miennes. La mort n’est pas la chose la plus effrayante, le pire c’est de réaliser au dernier moment que vous n’avez pas fait ce que vous vouliez faire. Utilisez vos challenges et transformez les en opportunités.Oui, la mucoviscidose tue et tuera encore mais n’importe qui peut mourir à n’importe quel moment et si ça arrive pourriez vous prétendre être satisfait de votre vie ?
Je suis sincèrement fière et satisfaite de ma vie. »

Chérissez chaque seconde avec ce que vous avez. On attend d’être en bonne santé, d’avoir une passion, de trouver l’amour avant de vivre notre vie au lieu de regarder ce qu’on a et d’en faire quelque chose.

« Vous n’aurez jamais vraiment ce que vous voulez tant que vous ne voulez pas ce que vous avez. »

Sa deuxième maison ; l’hôpital

Claire faisait 4 à 5 heures de traitements par jour, a subit plus de 35 opérations et a vécu un quart de sa vie à l’hôpital.
Elle affrime que 95 % de ses moments les plus heureux y ont eu lieu. Comme quand son père est resté une nuit à ses 13 ans pour voir ensemble la filmographie de Tarantino.

Liste des trucs sympas à l’hôpital : le room service (h24), le bouton d’appel, les courses en chaises roulantes (faut pas le dire), les distributeurs à nourriture partout, pas de couvre-feu, wifi & télé illimité, on doit pas faire son lit et nos draps sont changés tous les jours, on a pas besoin d’être présentable, de s’habiller, se maquiller ou de porter un soutien-gorge. On peut appeler les infirmières à n’importe quelle heure et elles sont obligées de nous écouter, pas de lessives, on peut porter les mêmes fringues pendant une semaine, les chambres sont en général très bien insonorisées du coup on peut écouter de la musique, on a plein de temps pour lire. Elle y a appris le piano, la langue des signes, l’espagnol (ou essayé du moins),.. On peut aussi créer des relations intenses avec les patient-e-s et les professionnel-le-s et se faire des souvenirs qui n’auraient jamais eu lieu dans le monde extérieur.

Naître malade, vivre malade

« Je crois que tout ce qui est sorti de bon dans ma vie vient de ma maladie. »

Claire a toujours dit avoir eu une vie incroyable et non pas malgré la maladie mais grâce à la maladie.

« Je suis pas là pour vous mentir, vous dire que ce n’est pas dur, c’est rude et douloureux.
L’espérance de vie est courte, j’ai vu mes parents avoir le cœur brisé et je pensais que c’était de ma faute. Vous pouvez souffrir et malgré tout ressentir toute l’humanité du monde et être heureux. Vous pouvez souffrir et faire quelque chose de votre vie. […]
Quand j’étais une petite fille, il n’y avait personne à qui je pouvais m’identifier sur la maladie et qui était inspirant. À la limite des gens avec une jambe en moins mais rien sur des personnes qui grâce à leur maladie avait contribué au monde par leur intellect. Petit à petit votre inconscient vous dit que vous n’en êtes pas capable, après tout, tout le monde est désolé pour vous et vous trouve misérable. »

Quand elle avait 8 ans, une personne de plus lui a dit être désolée pour elle, de sa situation et elle en a eu marre, elle lui a demandé à quoi ressemblait sa vie à lui ? Si il était heureux ? En réalité il s’avère que ce monsieur était extrêmement triste, sa femme venait de le quitter et il n’allait vraiment pas bien.
Être en bonne santé ne compte pas, c’est ce que vous faîtes avec la santé que vous avez qui compte, les gens n’aiment pas entendre ça et pourtant, c’est la même chose avec l’argent, ce n’est pas avoir de l’argent qui rend heureux, c’est ce que vous décidez d’en faire. À quoi bon avoir la santé, si vous n’en faîtes rien ?

« Un jour on m’a donné un livre de Stephen Hawking, j’avais 11 ans et je l’ai trouvé si cool.
J’ai lu davantage sur lui et j’ai découvert qu’il était comme moi. C’était incroyable. Ca me demandait tellement d’énergie de rester en vie, de faire mes traitements, j’avais besoin de quelque chose auquel me raccrocher, puis il y a eu le coma et la création de la fondation. On a réussi à faire hospitaliser une sans-abri qui avait la mucoviscidose et quand elle est sortie de l’hôpital elle a pu emménager dans son nouvel appartement. J’ai commencé à partager mon histoire à travers le monde et j’ai vu l’impact que je pouvais avoir. […]
Quand j’ai fêté mes 18 ans, j’étais entourée de plein de gens et ça m’a frappé, j’étais devenue cette personne par qui la petite Claire aurait été inspirée. »

Liste des choses que Claire a apprises en étant malade :

  1. Il n’y a rien de mal à demander de l’aide, à se montrer vulnérable
  2. Il n’y a pas de situation trop grave pour qu’on puisse en rire
  3. Être gentil avec les gens peut vous sauver la vie
  4. Ton corps n’a pas besoin d’être en parfait état pour fonctionner
  5. On peut faire des tours de magie : comme avaler 5 médicaments à la fois
  6. On peut prétendre être trop malade pour aller en cours et pas assez pour aller à l’hôpital
  7. On ne peut rien prédire dans la vie

Comment se comporter avec les personnes malades ?

« La mort et la maladie ont toujours fait partie de ma vie et le feront jusqu’au bout. Et avec tout ça, je vis ma meilleure vie. La vie ne s’arrête pas parce que vous êtes malade ou souffrant, elle n’est pas discriminante, elle est complexe. […] Il faut arrêter d’enseigner aux malades qu’ils ont besoin d’être en bonne santé avant de pouvoir vivre leur vie. Il faut leur apprendre à vivre avec la douleur et la souffrance. […] Les seules conversations autour des personnes malades sont « Peuvent-ils guérir? » et « Vont-ils mourir ? », et c’est tout ! Pensez au concept de « Make a Wish » (bon, j’en ai totalement profité) mais l’idée c’est de donner quelque chose à un enfant malade auquel il pourra se raccrocher. Vous connaissez les critères ? Il faut être assez malade pour avoir votre rêve, mais pas trop pour éviter que celui-ci ne vous tue. Mais réalisez-vous ce que ça apprend aux enfants malades ? Avoir un seul but et une fois qu’il est réalisé, c’est bon, vous pouvez mourir. Alors qu’on pourrait leur apprendre à faire de leur vie quelque chose de beau avec leur maladie. Qu’est-ce qu’on peut créer à partir de ça ? Parce que c’est tout ce qui compte. Quand vous regardez en arrière […] vous vous demandez ce que vous avez fait et ce que vous avez donné. Pensez aux gens incroyables dont l’histoire se souvient qui ont vécu avec d’énormes souffrances et ont pu en tirer des choses. On doit changer la façon dont on traite les maladies parce que la gamine de 6 ans que j’étais ne peux accepter qu’on lui dise qu’il y a quelque chose qui cloche quand elle est heureuse. […]
Quand vous prenez en pitié les personnes malades, vous leur enlevez leur force
.

Il faut leur apprendre à vivre leur vie en étant malade et pas les pousser à attendre que quelqu’un les réparent. Parce que vivre sainement et être bien, n’a rien à voir avec le fait qu’ils ne soient pas malades, il faut changer la vision des malades chroniques dans la société. »

« Grandir avec une maladie est un challenge mais ça ne l’est pas comme vous le pensez. »

Résumé des conseils de Claire pour intéragir avec une personne malade :

  • Vous pouvez nous aborder pour demander de quoi on souffre mais allez droit au but.
  • Ne dîtes pas aux malades que leur vie est horrible mais qu’elle est belle et complexe.
  • Ne nous dîtes pas quoi faire, vous n’êtes pas notre médecin.
  • N’amenez pas le sujet de l’espérance de vie sur le tapis, cela peut être un sujet sensible.
  • Être malade chronique ce n’est pas juste aller plus souvent chez le médecin, c’est un boulot à plein temps.
  • Attendez-vous à nous voir heureux, même si on est malade, on a autant d’expériences de vie et de moments de joie que n’importe qui d’autres.

Les proches de Claire continuaient de lui parler quand elle toussait, ce qui choquait les passants qui croyaient qu’elle était en train de mourir. Mais quand on tousse toutes les 5 minutes, on n’a pas envie que les gens s’arrêtent pour si peu. Quand Claire s’est réveillée du coma sa petite sœur lui a dit « Oh mince, j’aurais pas ton ipod ». Cette même sœur a pu apprécier les derniers mois avec Claire quand sa maladie gagnait du terrain car elle voyait bien qu’elle était elle-même et ne le cachait pas son état. Son père a affirmé qu’il n’échangerait jamais la fille qu’il a pour la même en bonne santé ; « J’ai eu cette expérience de père remarquable grâce à Claire en la voyant se transformer en une adulte merveilleuse et généreuse. »

Bonus & anecdotes

Ses contributions cinématographiques

Claire a suivi la série « Red band society » et a critiqué les épisodes sur youtube un à un à leur sortie, en commentant la crédibilité des dialogues, des décors, des jeux d’acteurs, etc. Elle a si bien fait ça qu’elle a été invitée sur le plateau de la série avant la fin du tournage et elle fait une apparition dans le dernier épisode.

Claire a inspiré le film « Five Feet Apart » et elle en était la référence médicale.

Leçon d’amour corporelle par Claire.

« On a pas trop le temps de se préoccuper de ce à quoi on ressemble quand on est en train de mourir, blanc comme un linge et couvert de cicatrices dues aux opérations. Être dans un corps qui fonctionne mal lui a au contraire permis de l’apprécier vu le nombre de fois où elle s’est demandée comment il pouvait encore être en vie. Nos corps ne sont pas là pour être beau mais pour être des œuvres d’art, cet art vous permet de penser, de ressentir et c’est exactement ce que fait votre corps. Peu importe les marques qu’il porte, ça ne le rend pas moins exceptionnel. »

Claire pouvait commencer une vidéo par « So… I’m dying » en étant rayonnante.
Elle justifiait toujours sa toux avec humour : « Boule de poils », « Grosse allergie aujourd’hui » ou encore « J’ai inhalé une frite ». Elle accrochait des moustaches à son oxygène, expliquait comme c’était pénible quand quelqu’un marchait sur le tube mais elle le prêtait volontiers à celleux qui voulaient l’essayer.
Elle s’est échappée de l’hôpital une fois pour rencontrer Bernie Sanders qui était de passage à Los Angeles.

Elle avait aussi dressé une liste des bons côtés de la maladie disant que chaque mini-fait était un accomplissement, ne serait-ce qu’un jour de plus sur terre. Elle se vantait de pouvoir sortir de n’importe quelle situation gênante en toussant et de pouvoir écourter les réunions de famille sans explication.

Dans une vidéo elle interroge sa maman sur ce que ça fait d’avoir un enfant mourant.
Elle souhaitait raconter toutes les étapes de sa transplantation des poumons.
Elle plaisantait sur le fait qu’elle voulait juste aller golfer une fois avant de mourir, c’était pas grand chose.

Claire mettait en avant le fait qu’elle ne souffrait pas nécessairement plus qu’une autre personne, ne connaissant pas l’histoire des gens mais elle était certaine qu’on ressentait tous les mêmes sentiments en tant qu’êtres humains.

« Après la mort, tu deviens plus proche de tout car tu es un peu partout à la fois. »

Aujourd’hui, j’espère vous avoir rapproché de Claire.

Si vous êtes encore là, je vous conseille vivement de regarder 2 minutes de ce documentaire (le timing est préparé). Et si vous en voulez encore, n’hésitez pas à le visionner en entier.

Sans titre.

Comme vous le savez probablement, je suis malade chronique et tente de militer et sensibiliser autour du handicap, des maladies chroniques et particulièrement des maladies dites « invisibles ». Lundi, j’ai réussi, après deux ans d’errance médicale à décrocher un deuxième diagnostic de maladie chronique et c’était un jour heureux, une réelle victoire.
En bref, en plus de ma sclérose en plaques, je suis aussi atteint de dysautonomie. Une dysautonomie c’est un dérèglement du système nerveux autonome, ce système s’occupe de tous ce que votre corps fait naturellement pour vous : respirer, faire battre votre cœur, digérer, transpirer, la vision, réguler votre tension ou votre température, etc. Le diagnostic est extrêmement compliqué car on ne connaît pas comment ce système fonctionne à l’heure actuelle mais une fois qu’il est atteint, plus rien ne va.

Alors que ma sclérose en plaques étaient enfin sous contrôle il y a deux ans, je me suis retrouvé avec des dizaines de symptômes plus invivables les uns que les autres qui ne semblaient pas liés à ma première pathologie (ou du moins pas tous). Malgré mes plaintes, on ne m’a pas proposé de faire d’examens pour investiguer même si il semblait clair qu’il y avait quelque chose. J’ai moi aussi nié ce qui m’arrivait en mettant tout sur le dos de ma première pathologie, c’était bien plus facile. Les mois passaient, mon état empirait, l’équipe soignante commençait à s’inquiéter de mes constantes à chaque visite. J’ai continué à en parler à mon spécialiste qui maintenait que ça ne collait pas à ma maladie alors j’ai fini par chercher moi-même. J’ai lu de nombreuses thèses et articles scientifiques puis je suis arrivé à une hypothèse diagnostique et je l’ai soumise à mon médecin. Il y était favorable également (j’ai la chance d’avoir un spécialiste ouvert d’esprit) mais il ne savait pas comment aller plus loin. On s’est finalement lancé avec l’aide du service de cardiologie à la recherche de cette fameuse cause et même si l’équipe prétendait connaître cette pathologie, ça n’a rien donné.

Durant cette période j’ai eu d’énormes moments de doutes, d’exaspération envers le corps médical, et un bon gros sentiment d’injustice. Savoir de quoi on souffre et ne pas pouvoir avoir gain de cause, c’est terriblement frustrant. Pour contrer ce sentiment, je me suis replongé dans la communauté handi du web, je follow énormément d’autres malades chroniques sur youtube et c’est réconfortant. Quand vous êtes un-e abonné-e assidu-e de vidéastes avec des maladies invisibles, au fil des vidéos vous apprenez à reconnaître certaines expressions du visage, certains signes de fatigue chronique intense. Ce qui est invisible devient visible et vous vous sentez proche de ces gens, vous comprenez cette souffrance que personne ne peut voir en vous regardant, en les regardant mais vous, vous savez. Ces personnes m’ont aidé à savoir en quoi consistait les tests médicaux que j’allais devoir faire, m’ont aidé à me rappeler à ne rien oublier dans ce que je devais rapporter au médecin mais surtout elles m’ont aidé à m’apaiser, à me sentir compris et ce depuis des années. Parmi ces précieuses personnes, il y a Jaquie Beckwith de la chaîne « Chronically Jaquie » (avec 135k d’abonné-e-s), Jaquie avait un syndrome d’Elhers Danlos, un syndrome d’activation mastocytaire, une gastroparésie et une dysautonomie (elle souffrait également d’asthme, de migraines, de narcolepsie, d’immunodéficience, de soucis génétiques, …). Jaquie a énormément apporté à la communauté, elle militait et vloguait tous les jours auparavant sur sa santé, sur son chien d’aide, sur les dispositifs médicaux, les traitements et bien d’autres encore. Elle avait décidé il y a quelques mois de réduire la cadence de ses vlogs car le rythme était trop soutenu pour son état de santé.

Grâce à ces personnes, je me suis accroché, j’ai rassemblé mes forces pour demander un deuxième avis dans une autre ville.

Le 29 avril, le jour où j’ai enfin eu mon diagnostic de dysautonomie était un grand jour, un jour que je n’oublierais pas car ce jour là est aussi le jour où Jaquie s’en est allée. Jaquie est décédée suite à une hernie intestinale, elle avait 23 ans. Aujourd’hui je voulais lui rendre hommage et quelle que soit votre situation, ne désespérez pas, il peut y avoir quelqu’un de l’autre côté du globe qui vous comprend, c’est aussi ça la beauté de notre monde, connecter les gens. Prenez soin de vous.

Pourquoi suivre des malades chroniques ou des personnes en situation de handicap ?

Il y a un moment déjà que je souhaite aborder ce point, lors d’un de mes traitements en hôpital de jour j’avais amené le sujet à une de mes infirmières qui avaient complètement bloqué à l’idée que ça puisse me faire du bien de m’entourer d’autres personnes malades. Bien que j’ai essayé d’expliquer les choses, je pense m’être assez mal débrouillé et je tiens à retenter l’expérience.

1. C’est un soutien moral considérable

Que la déprime vous touche ou non, quand on est atteint de certaines maladies, même en étant entouré-e on peut se sentir extrêmement seul-e face à la douleur, à la fatigue ou autres.
Suivre des personnes qui font face à des symptômes similaires va dans mon cas avoir un « effet cocon » même sans communiquer avec la personne en question, je vais me sentir compris.

> Se reposer, ça n’est pas ne rien faire – Vivre Avec

Cela s’applique aussi je pense aux proches et parents qui ont des enfants en situation de handicap et qui sont franchement pas aussi soutenu qu’il le faudrait en grande majorité. Trouver des témoignages de personnes vivant la même chose est précieux. Par contre, je vais éviter de les référencer parce que je suis pas fan des mineur-e-s affiché-e-s sur le net sans leur consentement.

2. C’est un contenu très éducatif

*Au niveau de la sensibilisation à l’accessibilité aux personnes en situation de handicap, vous pourrez non seulement prendre conscience des obstacles et apprendre comment en surmonter.

Quelques exemples :

> Des (vrais) sous-titres pour les sourds ! – MélanieDeaf

> How I use technology as a blind person ! – Molly Burke

*Au niveau des patients « experts », on peut y apprendre leur routine et gestes médicaux qui peuvent grandement aider un-e néophyte devant gérer les mêmes soins (ça ne veut pas dire qu’on s’abstient d’un suivi médical mais ça aide de pouvoir échanger avec des personnes plus expérimentées et virer un tabou). –Attention, âme sensible s’abstenir.-

> How to place an NG Tube – Amy Lee Fisher

> How to change Ostomy Bag, Tips & Tricks – Ostomy Girl

> How to access your own port-a-cath – The Frey Life

> Changing my feeding tube button at home ! – The Frey Life

3. Cela permet d’échanger et d’être conseillé

On a parfois besoin de poser des questions, de savoir comment gérer ses proches, comment préparer un rendez-vous médical. On a envie de savoir comment les autres arrivent à compiler études/boulot et rendez-vous médicaux quand c’est encore possible. C’est pas commun de croiser quelqu’un qui vit la même chose que nous quand notre état limite nos sorties mais heureusement avec la technologie actuelle on a la chance de pouvoir se rencontrer virtuellement et d’échanger.

> 9 façons de réduire la douleur – Vivre Avec

C’est pour toutes ses raisons qu’à l’avenir, en plus de l’index, j’espère pouvoir vous partager plus en détails quelques unes de mes découvertes et des belles âmes que j’ai pu croiser.